Brest le 3 février 2023
Mesdames et Messieurs les Député.es,
Votre prochain vote sur le projet de loi repoussant l’âge de départ à la retraite à 64 ans pourrait abimer notre modèle de protection sociale et engagera votre responsabilité en tant que représentants de la souveraineté nationale.
Je suis conscient de la situation délicate dans laquelle vous vous trouvez. Vous devrez, dans les jours qui viennent, arbitrer entre deux injonctions : celle de votre famille politique et celle de vos électrices et de vos électeurs.
Plusieurs critères permettent de déterminer si une réforme mérite d’être défendue.
D’abord, bien sûr, améliore-t-elle la vie des gens ? Vous admettrez qu’obliger tous les salariés à travailler deux années supplémentaires ne constitue pas une conquête sociale.
Ensuite, dispose-t-elle d’un soutien populaire ? A part le MEDEF, personne aujourd’hui ne soutient la retraite à 64 ans, qui a même permis la consolidation d’un front syndical uni inédit à son encontre.
Enfin, êtes-vous prêts vous-mêmes à la défendre devant celles et ceux qui en pâtiront ? Êtes-vous prêts à expliquer à un maçon qu’il doit travailler deux ans de plus malgré son dos brisé à porter des parpaings sa vie durant ? Êtes-vous prêts à expliquer à une salariée de l’agroalimentaire qu’elle travaillera 2 ans supplémentaires dans une chambre froide ? Êtes-vous prêts à expliquer à un chauffeur de poids lourds qu’il devra continuer à tirer des palettes de plusieurs dizaines de kilos 2 ans de plus ?
Qui écouterez-vous ? Votre parti ? Ou les citoyennes et les citoyens qui vous ont porté aux responsabilités et qui, depuis des semaines, témoignent qu’ils n’en peuvent plus ?
Avez-vous rencontré un seul électeur ou une seule électrice qui vous a dit, sur les marchés, en porte-à-porte ou dans une réunion publique, en juin 2022 : « Je vote pour vous pour que vous repoussiez l’âge de départ en retraite à 64 ans » ? Avez-vous, ces jours-ci reçus des messages de vos électeurs vous demandant de le faire ?
Votre majorité relative à l’Assemblée s’explique en partie par l’entêtement du Président Macron à vouloir présenter cette réforme. Mais il n’est pas trop tard pour en tirer les conséquences et retirer ce projet qui clive et fracture notre société à un moment où elle a au contraire besoin d’apaisement et d’unité.
Je vous invite, Mesdames et Messieurs les député.es, à bien mesurer les conséquences de votre vote. Vous avez pu constater, les 19 et 31 janvier, la détermination de dizaines de milliers de personnes dans les rues de notre département. Entendez-les ! Soyez leur porte-parole dans l’Hémicycle. Refusez de voter pour un projet très majoritairement rejeté. Il en va de l’avenir de notre modèle social et de la qualité de notre dialogue démocratique.
Respectueusement,
Tristan Foveau
Premier secrétaire fédéral du Parti socialiste du Finistère